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Oklahoma-Occitania
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  • Échanges culturels entre les Occitans de France et les Indiens d'Amérique (USA, Canada) : tribus Osage, Kiowa, Comanche, Cherokee, Pawnee, Choctaw, (Oklahoma), Lakota (Sud Dakota), Innu (Canada), etc.
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23 octobre 2007

Les Amérindiens de Guyane française

 

Lettre ouverte à Monsieur Sarkozy,

Président de la République Française,

de la part de quelques habitants de Maripasoula.

Maripasoula, le 20 octobre 2007,


guyane_villes_maripassoula

Depuis plusieurs années, l’Etat français laisse l’orpaillage illégal s’installer en Guyane. En plus des conséquences écologiques, le délabrement social prend des proportions scandaleuses dans la région du Haut-Maroni. Nous arrivons tout simplement à une situation de pré guerilla en France : sous nos yeux, orpailleurs illégaux et Amérindiens Wayanas et Emerillons des villages Cayodé et Elahé (villages de la commune de Maripasoula) sont en train de se « faire la guerre » sur la rivière Waki-Tampok.

Les très médiatiques opérations Ananconda n’ont que peu d’effet dans la réalité puisque les sites d’orpaillage illégaux sont de plus en plus nombreux. Nous pouvons le constater tous les jours au vu de la multiplication des activités liées à l’orpaillage dans le bourg de Maripa-Soula et sur sa périphérie. Ceux qui disent le contraire sont tout simplement des menteurs qui ont certainement des intérêts à protéger. Les eaux qui passent devant Cayodé et Elahé sont devenues tellement turbides qu’il n’est plus possible de la boire ni de s’y laver, or il n’y a pas de service de distribution d’eau courante conséquent dans les villages amérindiens (seulement quelques points d’eau publics). Quant à sa qualité de garde manger, la rivière se vide rapidement de ses poissons (la nourriture de base dans la région) qui migrent vers des zones moins polluées. Les quelques poissons restants sont infectés au mercure, intoxiquant ceux qui les consomment.

Face à un désengagement manifeste de l’Etat français, les Wayanas et les Emerillons ont été obligés de se débrouiller seuls pour protéger leurs lieux de vie, la forêt et le fleuve, mettant en place un système dangereux et à double tranchant de barrage et de taxes au passage des pirogues d’orpailleurs (Rhum, fut de gasoil, riz, or…). Se faire justice soi-même n’est jamais bon, c’est ce qu’on nous apprend à l’école républicaine, c’est interdit par la loi. Mais si personne n’est là pour la faire respecter ?

Cette situation ne pouvait manquer de dégénérer… ceci est arrivé une fois de plus cette semaine : il y a eu des échanges de coups de feu entre amérindiens et orpailleurs clandestins à proximité des villages. Un habitant a été blessé et une décharge est passée à proximité du compagnon d’une des enseignantes du village de Cayodé ; le rectorat a décidé d’évacuer son personnel, laissant les enfants sans école et dans une situation périlleuse.

Alors, Monsieur le Président, vous qui vous proclamez comme le champion de la sûreté intérieure, le caïd de la lutte contre la clandestinité et le travail illégal, nous vous prenons au mot : aujourd’hui, dans la forêt française de Guyane, ce ne sont pas les forces de l’ordre qui passent le « karcher », mais bien la « racaille », qui avec ses lances à eau à haute pression sape les berges des cours d’eau, les transformant en de stériles évacuations de boue turbide et mercurée. Les riverains acculés à une mort lente ont décidé de se battre seuls.

A quelques jours des Grenelles de l’environnement, vous qui prétendez vouloir mettre les moyens nécessaires à la protection de la nature et à la limitation du réchauffement climatique, nous nous insurgeons contre ces actions ostentatoires, de lutte contre l’orpaillage clandestin qui consistent à la destruction (et non la récupération en vue d’une redistribution) du matériel saisi (pompes à gasoil, fûts de gasoil, moteurs hors-bord, groupes électrogènes, etc…). Pour exemple, l’ordre récent du Procureur de la République de détruire une trentaine de fûts de gasoil est tout simplement scandaleux : les gendarmes les ont brûlés en pleine zone urbaine, recouvrant une bonne partie du bourg de Maripasoula d’un fumée noire et opaque ; ce qui n’a pas pris feu s’est écoulé pendant plusieurs jours dans le Lawa (le fleuve qui borde la ville), dégageant une forte odeur et empêchant quiconque de s’y baigner. Juste à côté, la centrale thermique EDF de Maripasoula est souvent en rupture de stock de gasoil…

Faudra-t-il attendre la mort de citoyens pour que l’Etat mette enfin les moyens réellement nécessaires pour éradiquer l’orpaillage clandestin ? Quel est l’intérêt de la France à laisser s’installer le chaos ? L’Etat ou quelques personnes, ont-ils des intérêts supérieurs à laisser la situation se dégrader jusqu’à engendrer une guérilla, voir un véritable conflit en Guyane française ? L’Etat attend-il que les Amérindiens, las, se résignent à abandonner leur village et la forêt aux seuls chercheurs d’or ? Quand pourrons-nous de nouveau circuler librement sans risquer la mort par arme à feu, sur les cours d’eau de la région de nouveau limpides et poissonneux ? Quand pourrons-nous de nouveau vivre dans les villages sereinement sans avoir la peur au ventre, sans avoir à se faire justice soi-même ? Nous vous posons la question, Monsieur le Président, car nous sommes sincèrement écoeurés de la situation.
Nous qui habitons Maripa-Soula, en avons plus qu’assez d’un Etat qui ne s’investit pas plus sérieusement dans une situation des plus conflictuelles et qui risque de déborder de la forêt jusqu’au bourg de Maripasoula. Nous demandons à ce que l'Etat prenne enfin ses responsabilités, et au plus vite, en faveur d’une vie plus paisible sur le fleuve. Nous demandons à ce que vous preniez vos responsabilités, Monsieur le Président.

Des habitants de la commune de Maripa-Soula.

 

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