Chez nos amis de la Belle Province (6)
Le guide du routard nous avertissait : le plus grand intérêt de cet endroit résidait , non pas dans l’éventuel charme du lieu, mais dans le rapport avec ses habitants, avec la richesse de leur culture et de leur philosophie axée sur la beauté et le respect de la nature. Mais dit aussi le routard, « les Montagnais ne se livrent pas au premier touriste venu ».
Et il est vrai que le contact avec l’homme de la rue n’est pas spontané ; quelques mots échangés avec l’employée de la boutique d’artisanat, les guides du musée ou les anciens qui confectionnent des objets dans leur salle de réunion.
Alors, il nous faut nous en remettre à nos vieilles connaissances, ce qui n’est déjà pas si mal !
Les Moar nous reçoivent dans leur maison de la rue principale, et autour du verre de l’amitié, nous entendons le rire toujours sonore et expressif de Clifford nous raconter quelques souvenirs qu’il a ramené de ses séjours en Occitanie ; et en particulier son séjour en 1998 à Alzen avec l’annonce qu’un don de terre allait lui être proposé au nom de sa communauté dont il était le chef. Devait-il accepter ou refuser cet étrange présent ?
Et de prolonger son récit en relatant le signe qui lui a
permis de dire oui.
Lorenne son épouse, Wendy et David ses enfants, tous venus chez nous à notre invitation, se mêlent à la conversation et évoquent aussi leurs séjours et les rencontres faites avec Ok-Oc.
Claude Boivin que nous avions reçu lors de notre récent printemps indien de 2008, nous a consacré quelques jours pour nous guider dans la réserve et nous montrer un peu de ce territoire innu qu’il apprécie tant. Son regard pétille lorsqu’il nous parle du Pekuakami, de son action auprès des jeunes, du renouveau du pow wow qui s’est déroulé cette année pour la deuxième année consécutive, renouveau auquel il a largement participé. Mais la colère gronde dans son for intérieur lorsque est évoqué le pensionnat ou la déforestation que pratique Abitibi-Consolidated.
Une tape amicale, un bonjour échangé au volant de sa voiture, une petite conversation au coin de la rue ne trompent pas : Claude est apprécié et populaire dans la communauté.
Sébastien Kurtness ( à gauche sur la photo) est l’adjoint au chef du conseil de bande ; il est l’héritier d’une lignée de Kurtness qui ont toujours exercé des responsabilités dans la communauté.
Lui, c’est un « politique » qui nous reçoit dans la salle où siège le conseil de bande et son propos est très rapidement orienté sur les problèmes créés par les diverses lois sur les Indiens adoptées par la constitution canadienne et qui ont bien failli faire disparaître définitivement la reconnaissance et le statut de peuple et de citoyen indien. Il nous parle aussi des négociations territoriales qui durent depuis plus de 25 ans et n’ont toujours pas abouti.
On le sent prêt à en découdre avec les représentants du gouvernement dans des négociations à venir ; il porte son peuple et ses revendications économiques, territoriales, culturelles, sociales. (à suivre)
Gérard Massip