paléontologie en pays navajo
Sur les traces
des terribles lézards
Notre petit groupe : Marie-Claude + Edgard Strigler & Monique + Jean-Claude Drouilhet parcourt le territoire de la nation Navajo dans un 4x4 Ford explorer dont la location s'imposait compte-tenu des pistes, des cahots, de la poussière, du désert.
En Arizona, dans la réserve de la nation Navajo, à l'ouest de la petite ville de Tuba City, nous arrivons sur un site impressionnant qui fut parcouru en tous sens il y a des dizaines de millions d'années par de gigantesques dinosaures carnivores. Des jeunes guides navajos accompagnent la visite si l'on veut. Sinon on peut aller seuls sur la piste de ces géants du jurassique inférieur qui gambadaient là il y a entre 199 et 183 millions d'années. Il s'agit du Dilosophorus. Sympa la bestiole ! On en voit quelques-uns dans le film Jurassic Park.
l'impression de les suivre à la trace, comme s'ils étaient passés là 10 minutes avant
Recréer
les espèces disparues ?
Ce vieux rêve hante toujours les esprits surchauffés. C'est le thème du film Jurassic Park de Spielberg et du magnifique roman de Michael Crighton intitulé Le Parc Jurassique dans sa première édition française d'où a été adapté le film. Là, nous étions dans la fiction dont nous savons aujourd'hui qu'elle est techniquement impossible à réaliser. C'est du roman et du cinéma. Bravo !
Mais voilà ce qui pourrait nous inquiéter si les simples citoyens que nous sommes laissent faire les apprentis sorciers. Pas nécessaire d'être un scientifique pour crier alerte ! Il est fortement question de recréer deux espèces disparues : le Mammouth laineux et ... L'homme de Néanterthal. Pas moins...
Le mammouth laineux
Des chercheurs travaillent sur le projet de recréer un mammouth avant 2017. Les mammouths laineux sont apparus pratiquement en même temps que les hommes, mais leur histoire fut beaucoup plus courte. A la différence des dinosaures dont les restes sont surtout découverts dans des déserts arides rocheux, les mammouths fossiles sont retrouvés dans le pergélisol en Sibérie subarctique et en Amérique du Nord. Les tissus mous, les os et même dans certains cas la fourrure congelés se sont bien conservés durant dix mille ans dans ce réfrigérateur naturel. Ce qui a permis aux chercheurs d’avancer l’idée de cloner un mammouth. Il ne faut pour cela qu’un fragment de tissus dans lequel l’ADN se soit bien conservé. La réalisation de ce projet est tout à fait possible, mais ne mènera à rien de bon.
Que fera-t-on de ces animaux, en supposant que l'expérience réussisse ? Les enfermer dans un parc zoologique ? Les lâcher dans le milieu naturel d'origine de leurs ancêtres ? Dans les deux cas, gare aux accidents.
L'aurochs
Dans le même ordre d'idée l'expérience a été tentée et (presque) réussie avec l'aurochs (Bos primegenius), l'ancêtre sauvage de nos boeufs, vaches et taureaux domestiques qui parcouraient l'Europe sans frontières des âges farouches. Par sélection remontante à partir des caractères archaïques des bœufs domestiques on a obtenu en plus petit et moins cornu des individus qui ressemblent vaguement à ces ancêtres. On pouvait voir il y a quelques années l'un d'eux au parc animalier de Gramat (Lot)
L'homme de Néanderthal
Mais voilà qui devient plus grave et inquiétant. Un (groupe de) chercheur(s) aux Etats-unis envisage de redonner vie à une espèce humaine disparue, celle qui nous a précédés en Europe et qui a même vécu quelques millénaires en même temps que nos ancêtres. Il s'agit de l'homme de Néandertal (Homo sapiens neanderthalensis). Rappelons que notre espèce, unique actuellement sur la terre, est l'Homo sapiens sapiens. Ceci pour dire que ce qui nous différencie de Néandertal se situe seulement au niveau de la sous-espèce. Mais nous appartenions à la même espèce. Respect.
Ces humains disparus avaient un cerveau plus grand que le nôtre. Est-ce à dire qu'ils étaient plus intelligents ? Certains le pensent mais sont bien incapables de le démontrer. D'ailleurs, qu'est-ce que l'intelligence ? Vaste problème...
George Church n'a rien du savant fou. Ce professeur de génétique à Harvard est l'un des pionniers d'une branche un peu particulière de la science: la biologie synthétique, dont le but est de recréer certains des organismes in vitro, grâce à de l'ADN.
Son projet, redonner vie, pourquoi pas, à l'homme de Néandertal. D'après lui, les technologies dont nous disposons nous permettraient de cloner des membres de cette espèce d'homme disparue il y a environ 28.000 ans.
Lire et écrire de l'ADN sont des procédés désormais suffisamment rapides pour que cela ait lieu de son vivant, affirme-t-il. Seule ombre au tableau, il faudrait déjà savoir comment cloner des humains, mais aussi se l'autoriser. Néanmoins, Church estime que cela devrait être possible rapidement. Quant à la législation, si elle interdit le clonage humain dans certains pays comme l'Allemagne ou la France, il affirme que ce n'est pas le cas partout et n'exclut pas que les lois puissent changer.
Supposons un instant que les difficultés technologiques soient surmontées et les obstacles juridiques écartés. La question qui va se poser est toujours la même : pour quoi faire ? Attention, cette fois nous touchons à l'humain, à notre famille, notre genre, notre espèce. D'autres s'y sont essayés autrefois avec les conséquences désastreuses que l'on sait.
Church argumente en faveur de la diversité de notre espèce. Qui sait pense-t'il si l'homme de Néandertal avec une pensée différente de la nôtre, peut-être plus puissante ou plus astucieuse, ne parviendra pas à fournir des réponses pertinentes aux grands problèmes qui nous menacent : épidémies, etc.
Dès lors, suffirait-il de créer un seul Néandertal pour s'en rendre compte ? Non, estime Church. Il faudrait en cloner une cohorte afin qu'ils aient un sentiment d'identité et pourquoi pas aboutir à une culture néo-néandertalienne, et même les laisser former leur propre force politique.
Comment imaginer que ces humains archaïques puissent être acceptés des humains modernes ? Quand on voit le mal que l'on se donne pour accepter nos semblables, réfugiés d'autres parties de la planète devenues invivables, quel niveau de tolérance faudrait-il déployer ?
Ensuite, si nous voulons parler de préserver la diversité, ne faudrait-il pas commencer par celle qui existe encore ?
Enfin, dernière question mais pas la moindre : où faire vivre cette cohorte ? Parmi nous, impossible pour de multiples raisons. Sur une île déserte ? Il n'y en a plus, sauf à réquisitionner des îles de milliardaires (là, par contre, il y en a). Il a fallu des milliers de générations se transmettant les connaissances pour atteindre un niveau de civilisation. Mais qui apprendra à ces humains les techniques de survie ? Peut-être les commandos de la Légion rentrant d'un stage de survie en Amazonie.
Vaste question ! Si la concurrence de nos ancêtres directs en est la (l'une des) cause(s), alors il aurait mieux valu les aider. Cela éviterait aujourd'hui à certains de vouloir les faire renaître.
Conclusion : la diversité humaine existe aujourd'hui, selon des formes culturelles, spirituelles, techniques paraissant parfois très éloignées les unes des autres. Alors respectons ce qui est respectable et combattons pacifiquement ce qui ne l'est pas. Tous les hommes (et les femmes) sont frères (et sœurs). C'est la grande leçon des Guerriers de l'Arc-en-ciel des Indiens d'Amérique *
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* Selon une légende des Indiens Cherokee (et d'autres cultures amérindiennes) le jour viendra où les peuples du monde se reconnaîtront comme les membres d’une même famille. Alors ces Guerriers de l’Arc-en-Ciel se rassembleront afin de conduire pacifiquement à de grands changements qui concerneront autant les relations harmonieuses entre les peuples que les relations avec tout ce qui existe sur la Terre-Mère.