Geronimo
L'honneur des Apache-Chiricahua
par Marie-Claude Strigler
Beaucoup d’Amérindiens se sont émus que le nom de code donné par la CIA à l’opération contre Ben Laden soit « Géronima EKIA » (Enemy killed in action), alors même que Géronima est désormais un héros national.
Ok-Oc a partagé cette émotion. Bien que le nom de Géronimo nous soit familier, voici un petit résumé de la vie du Sage apache.
Géronimo (ou Goyathlay – celui qui baille) naquit en 1829 dans ce qui est aujourd’hui le Nouveau-Mexique, mais qui était alors encore un territoire mexicain. On dit que ce sont les militaires mexicains qui lui ont donné son nom, sans que l’on sache exactement pourquoi. Ses nombreux faits d’armes, y compris son invulnérabilité supposée aux balles, étaient attribués aux pouvoirs conférés par des êtres surnaturels.
Géronimo fut à la tête des dernières forces de résistance indienne qui capitulèrent devant les États-Unis. L’opiniâtreté de sa résistance en fit le plus célèbre de tous les Apaches. Alors que pour les colons d’Arizona et du Nouveau-Mexique c’était un meurtrier sanguinaire, pour les Apaches, il incarnait l’essence de leurs valeurs, agressivité et courage dans les épreuves. Les Chiricahuas étaient semi-nomades et vivaient de chasse et de cueillette. Mais lorsque la nourriture venait à manquer, il était coutumier de lancer des raids contre les tribus voisines. Les raid suivis de représailles étaient un mode de vie tout à fait honorable dans la région, Géronimo y jouait un rôle de premier plan.
1858 fut une année charnière dans la vie de Géronimo : de retour d’une expédition au Mexique, il trouva sa femme, sa mère et ses trois jeunes enfants assassinés par les troupes espagnoles. Cette tragédie lui inspira une telle haine des Blancs qu’il jura d’en tuer autant qu’il pourrait. C’est quelque temps après qu’il reçut les visions qui lui conférèrent ses pouvoirs. Géronimo ne fut jamais un chef, mais un homme-médecine, un chef spirituel dont la sagesse guidait les chefs apaches.
Apaches dans la réserve de San Carlos
En 1875, tous les Apaches à l’ouest du Rio Grande furent déportés dans la Réserve de San Carlos, dont Géronimo réussit à s’évader trois fois.. En 1876, il s’enfuit au Mexique, où il échappa à l’armée pendant des années. La presse à sensation exagérait ses activités (il livrait une véritable guerrilla) et faisait de lui le plus terrifiant des Apaches. Les derniers mois de la campagne demandèrent plus de 5 000 soldats, 500 éclaireurs et quelque 3 000 soldats mexicains pour débusquer Géronimo et sa bande.
Au mois de mai 1882, des éclaireurs apaches surprirent Géronimo dans son repaire de la Sierra Madre et il accepta enfin de rejoindre son peuple dans sa réserve. Là, il vécut calmement en cultivant la terre pendant un an ; mais l’arrestation soudaine d’un guerrier apache et des rumeurs de pendaisons imminentes l’incitèrent à s’enfuir à nouveau en 1885 avec 35 guerriers et 105 femmes et enfants. Au mois de janvier 1886, des éclaireurs le débusquèrent à nouveau dans un repaire apparemment imprenable. Il accepta de se rendre le 17 mai 1886, après avoir négocié un accord devant témoins.
Apaches à Fort Pikens (Floride)
Le gouvernement ne respecta pas leur accord et fit transférer Géronimo et presque 450 Apaches, hommes, femmes et enfants, dans les forts Marion et Pickens, en Floride. Puis, en 1894, ils furent déplacés à Fort Sill en Oklahoma. Là, Géronimo devint éleveur, parut en 1904 à l’exposition sur l’achat de la Louisiane à Saint-Louis, vendit des « souvenirs de Géronimo » et participa à la parade inaugurale de 1905 du président Théodore Roosevelt.
Sa réputation ne faiblit pas, car ce fut un stratège remarquable grâce à sa parfaite connaissance du terrain et à ses qualités de psychologue, qui lui permirent de résister si longtemps avec des moyens très limités.
Le gouvernement ne le laissa jamais retourner chez lui. Il s’éteignit le 17 février 1909, prisonnier de guerre, et fut enterré au cimetière de Fort Sill en Oklahoma. On ne peut dire qu’il y repose en paix, puisque sa tombe fut profanée, mais ceci est une autre histoire…
Tombe de Geronimo à Fort Sill (Oklahoma)
Marie-Claude Strigler